Latin  >  Langue

Précédente leçon sur les déclinaisons nominales

Troisième leçon sur la déclinaison des adjectifs

Rappels

Nous avons vu précédemment les principes de la déclinaison et les formes prises par les noms (que vous ayez parcouru une partie de la page ou la totalité).

Nous allons nous attaquer désormais à la conjugaison. Nous verrons d’abord quelques généralités, puis le temps du présent de l’indicatif.

Généralités sur le verbe latin

Le système verbal latin présente des points communs avec le système français, mais aussi des différences. Je vous propose de les voir successivement.

D’abord, les points communs :

• le verbe se conjugue, possède six personnes, correspondant aux personnes grammaticales que nous connaissons (à l’exception du vous de politesse qui n’existe pas : le latin tutoie tout le monde !).
• il existe les mêmes modes qu’en français, à l’exception du conditionnel. Ils sont soit personnels (tels l’indicatif, le subjonctif, l’impératif) soit non personnels (l’infinitif, le participe, le gérondif, dont le sens et la fonction sont radicalement différents du français) ; s’y ajoutent le supin et l’adjectif verbal inconnus en français.
• les mêmes modalités temporelles que le français existent (présent, passé, futur), beaucoup de temps verbaux portent des noms identiques au temps français (imparfait, plus-que-parfait, par exemple), mais leurs valeurs sont parfois différentes.

Puis les différences :

• la principale d’entre elles est l’absence de pronoms personnels sujets. Certes, ils existent, mais sont utilisés à des fins d’insistance (comme moi, je... en français), et de façon habituelle seule la désinence verbale de personne indique la personne (ainsi amo = j’aime, amas = tu aimes).
• autre différence, la présence d’une véritable conjugaison passive à côté de l’actif, alors qu’en français comme dans d’autres, on utilise un auxiliaire pour la voix passive (ainsi amo = j’aime, amor = je suis aimé(e)). Il existe également une troisième voix, les verbes déponents, qui ont une conjugaison passive et un sens actif (vereor = je crains).
• de même, il n’existe pas en latin de temps composés (comme le passé composé français qui utilise un auxiliaire suivi du participe passé, j’ai chanté), les temps correspondant à ces temps français ont une désinence de temps et de personne (amavero = j’aurai aimé). On relève néanmoins une exception à cezrtains temps du passif (amatus eram = j’avais été aimé).
• enfin, les verbes latins, réguliers ou irréguliers (eh oui, il y en a !), possèdent trois formes appelées temps primitifs à partir desquels on peut former tous les temps de la conjugaison : on les désigne sous le nom de thème (au sens de radical), et on a ainsi le thème du présent (appelé infectum), celui du parfait (appelé perfectum) et celui du supin. Les dictionnaires mentionnent ces temps primitifs pour chaque verbe : par exemple amo, amare (1^re personne du singulier du présent de l’indicatif et infinitif présent => thème du présent), amavi (1^re personne du singulier du parfait de l’indicatif => thème du parfait), amatum (supin => thème du supin).

Retour au sommaire

Le présent de l’indicatif

Commençons par un temps simple, dont les fonctions sont relativement proches du français, le présent de l’indicatif. Nous reviendrons plus tard sur ce mode.

Le verbe sum et ses composés

Le verbe « être » (sum en latin) a une conjugaison irrégulière dans beaucoup de langues, et le latin ne fait pas exception. Rappelons au passage que les verbes latins sont désignés et répertoriés (dans les lexiques et dictionnaires) par la forme de 1^re personne du singulier (là où la langue française utilise l’infinitif).

sum au présent

1re du sing.	sum
2e du sing.	es
3e du sing.	est
1re du plur.	sumus
2e du plur.	estis
3e du plur.	sunt

Quelques remarques :

• malgré une apparence irrégulière, les désinences de personne (mise en évidence en rouge) sont celles de tous les temps verbaux à l’actif (sauf le parfait), à savoir :
  
  m ou o, s, t au singulier
  mus, tis, nt au pluriel
• on note le reste d’une ancienne alternance su/es, que l’on retrouve dans d’autres langues indo-européennes, mais qui n‘est qu’une survivance en latin.
• le sens du verbe est être, marquant l’existence ou l’identité – nous verrons plus loin (j’y ai fait allusion plus haut) qu’il peut aussi servir d’auxiliaire. Il peut aussi marquer l’appartenance (suivi du datif : Ager agricolae est, le champ est au paysan c’est-à-dire le paysan possède le champ), parmi ses nombreux autres sens.
• signalons aussi que ce verbe est parfois sous-entendu, lorsqu’il n’y a aucune ambiguïté.
• enfin, sum entre dans la composition de plusieurs verbes qui se conjuguent comme lui (beaucoup ont un complément au datif : oppido praesum, je commande une place-forte par exemple). Tels sont absum, être absent, loin ou desum, manquer, par exemple (voir la liste dans le vocabulaire correspondant au début de cette leçon).
• deux autres des composés de sum ont une conjugaison particulière qui varie selon la personne et l’initiale de la forme prise par la conjugaison de sum (s- ou e-). Les voici :
  • possum, potes : pouvoir
  • prosum, prodes : être utile
  J’ai placé la conjugaison complète du présent ci-dessous à côté d’un autre composé de sum dont la formation est régulière.

absum au présent

1re du sing.	absum
2e du sing.	abes
3e du sing.	abest
1re du plur.	absumus
2e du plur.	abestis
3e du plur.	absunt

possum au présent

1re du sing.	possum
2e du sing.	potes
3e du sing.	potest
1re du plur.	possumus
2e du plur.	potestis
3e du plur.	possunt

prosum au présent

1re du sing.	prosum
2e du sing.	prodes
3e du sing.	prodest
1re du plur.	prosumus
2e du plur.	prodestis
3e du plur.	prosunt

Retour au sommaire

Les verbes réguliers : 1^re et 2^e conjugaisons

Il existe cinq conjugaisons de verbes réguliers (bien sûr la latin n’ignore pas les conjugaisons irrégulières, mais elles sont relativement peu nombreuses, les irrégularités concernant davantage la formation du parfait et du supin). Elles sont numérotées de 1 à 4, la dernière se nomme 3^e mixte (ou simplement mixte) parce qu’elle emprunte ses formes aux 3^e et 4^e.

Sans rentrer dans les détails, on dira que les 1^re, 2^e et 4^e conjugaisons se distinguent par un radical terminé par une voyelle longue, respectivement ā, ē et ī, alors que les verbes de la 3^e ont un radical en consonne ou ŭ (u bref) et ceux de la mixte un radical en ĭ (probablement). Les conséquences sur la conjugaison sont minimes et il est inutile d’en parler ici.

Nous allons voir dans un premier temps le présent des deux premières conjugaisons dont une qui comporte une très grande majorité de verbes réguliers. Le modèle de la 1^re est le verbe aimer, amo, are, celui de la 2^e le verbe détruire, deleo (pour rappel, la deuxième forme est l’infinitif dont nous reparlerons ci-dessous). Pour faciliter l’apprentissage, j’ai écrit d’une couleur distincte la voyelle finale du radical.

1^re conjugaison au présent

1re du sing.	amo
2e du sing.	amas
3e du sing.	amat
1re du plur.	amamus
2e du plur.	amatis
3e du plur.	amant

2^e conjugaison au présent

1re du sing.	deleo
2e du sing.	deles
3e du sing.	delet
1re du plur.	delemus
2e du plur.	deletis
3e du plur.	delent

• une remarque étymologique sur le verbe deleo qui est à l’origine du mot indélébile (qu’on ne peut effacer), également du verbe anglais delete (effacer), connu de tous les manipulateurs de claviers informatiques à cause de la touche « del(ete) ».

Comme pour la leçon sur les déclinaisons, nous pouvons marquer une pause. Pour revoir (ou découvrir tout de suite) les autres conjugaisons au présent, voir ci-dessous ; pour apprendre le sens d’un certain nombre de verbes se conjuguant suivant les modèles ci-dessus, c’est par ici ; pour la troisième leçon consacrée aux adjectifs qualificatifs, la suite se trouve par là.

Retour au sommaire

Les verbes réguliers : les trois dernières conjugaisons

Les trois dernières conjugaisons possèdent plusieurs points communs, dont la présence d’un i au présent (même si son origine et sa quantité (longueur) diffèrent). La 4^e comprend quelques verbes réguliers (et des irréguliers), alors que les deux autres sont constituées uniquement de verbes irréguliers. Ces irrégularités concernent, nous l’avons vu, la formation du parfait et du supin, et donc aucune difficulté n’apparaît au présent de l’indicatif.

Les modèles pour ces conjugaisons sont les suivants : lego, lire pour la 3^e, capio, prendre pour la (3^e) mixte, et audio, entendre pour la 4^e.

3^e conjugaison au présent

1re du sing.	lego
2e du sing.	legis
3e du sing.	legit
1re du plur.	legimus
2e du plur.	legitis
3e du plur.	legunt

(3^e) conjugaison mixte au présent

1re du sing.	capio
2e du sing.	capis
3e du sing.	capit
1re du plur.	capimus
2e du plur.	capitis
3e du plur.	capiunt

4^e conjugaison au présent

1re du sing.	audio
2e du sing.	audis
3e du sing.	audit
1re du plur.	audimus
2e du plur.	auditis
3e du plur.	audiunt

Retour au sommaire

L’infinitif présent

Le mode infinitif existe en latin, et nous verrons plus loin que les trois modalités temporelles (passé, présent, futur) y sont représentées. Il joue également un rôle non négligeable dans la syntaxe, puisqu’il peut être le noyau de propositions (dites propositions infinitives).

La formation est simple, puisqu’il suffit d’ajouter la terminaison re au radical du verbe (éventuellement précédé d’une voyelle de liaison pour la 3^e conjugaison et la (3^e) mixte). Ainsi nous aurons les formes suivantes (pour faciliter l’apprentissage, j’ai écrit d’une couleur distincte la voyelle finale du radical ou la voyelle de liaison) :

l’infinitif présent des conjugaisons régulières

1re	2e	3e	(3e) mixte	4e
amare	delere	legere	capere	audire

Je n’ai pas indiqué ci-dessus la longueur des voyelles, mais si l’on veut être précis, on ajoutera que la voyelle de liaison est brève (ĕ, 3^e conjugaison et (3^e) mixte), alors que la voyelle de fin du radical est longue (ā, ē, ī, respectivement 1^re, 2^e et 4^e conjugaisons).

Pour le verbe sum et ses composés, on utilise la désinence se (qui, antérieurement, était la marque de tous les infinitifs), en tenant compte des exceptions évoquées ci-dessus. Je reprends les mêmes exemples de verbes.

l’infinitif de sum et de ses composés

sum	absum	possum	prosum
esse	abesse	posse	prodesse

Retour au sommaire

Pour finir, rappelons qu’il est facile de déterminer comment conjuguer un verbe dont la conjugaison est régulière, à partir de la 1^re personne du singulier du présent de l’indicatif et de l’infinitif présent. Pour mémoire (je n’ai pas indiqué la longueur des voyelles) :

conjugaison	1re	2e	3e	(3e) mixte	4e
1re pers. du sing.	o	eo	o	io	io
infinitif	are	ere	ere	ere	ire

Retour au sommaire

Pour apprendre le sens d’un certain nombre de verbes se conjuguant suivant les modèles ci-dessus, c’est par ici ; pour la troisième leçon consacrée à l’adjectif qualificatif, la suite se trouve par là.

Liens vers les pages de vocabulaire indiquées sur cette page et la précédente

Rappel : ces listes proposent quelques dizaines de mots courants sur chaque page, permettant ainsi une acquisition progressive du vocabulaire latin. Il ne s’agit en aucun cas de répertoires exhaustifs.

• page 1 : Les noms des deux premières déclinaisons
• page 1 bis : Les noms des trois dernières déclinaisons
• page 2 : Sum et les verbes des deux premières conjugaisons
• page 2 bis : Les verbes des trois dernières conjugaisons

Voici aussi quelques pages « thématiques » (sans lien avec celles qui précèdent) :

• Le vocabulaire des animaux en latin
• Le vocabulaire de la famille en latin

Retour au sommaire